« Il me manque. » Un réveil dur, une mine affreuse et un air maussade. La première pensée de Sunday-Jules Fawkes Phoenix ce matin fut tournée vers un homme. Un homme qu'elle avait aimé. Qu'elle avait tellement aimé qu'il était impossible pour elle de l'oublier. Oui, la première pensée de notre jeune femme ne fut pas la meilleure, ce matin. Une envie soudaine de pleurer lui prit sournoisement, et pour se cacher d'elle-même, elle ferma les yeux, s'engouffrant un peu plus sous sa couette, ses cheveux blonds lui recouvrant tout le visage. « Il me manque tellement. » Parce que c'était vrai. Il lui manquait. Lui. Et personne d'autre. Parce qu'il avait été son coup de foudre, celui qui l'avait rendu vivante. Tout lui manquait chez lui. Son sourire de tombeur. Ses cheveux noirs qu'elle aimait caresser. Ses lèvres, douces et masculines, qu'elle aimait embrasser. Toutes les nuits passaient avec lui revenaient dans sa mémoire, dans une vivacité qui la blessait fortement. Ces souvenirs étaient trop douloureux. La blessure était encore fraîche. La preuve, elle y pensait même le matin, elle, Sunday-Jules, la fille forte et indépendante qui a toujours prétendu ne jamais pouvoir tomber amoureuse. « Tu le sais toi, hein, qu'il me manque ? Diesel, son petit chaton gris vint lui chatouiller le visage, et Jules l'attira délicatement contre elle, ravalant ses larmes pour sortir de sa couette et soupirer. Vint le moment où elle se leva. Habillée d'une petite nuisette beige, elle traversa sa chambre pour entrer dans sa salle de bain. Un bon brossage de dents, une douche bien chaude et un petit détour dans sa garde robe. Elle décida alors de se vêtir d'un débardeur rentré dans un mini-short lui remontant presque au nombril. En regardant l'heure, Sunday s'aperçut qu'il était déjà onze heure. L'heure à laquelle elle avait l'habitude de sortir prendre un bon bol d'air frais. Elle se maquilla légèrement. Un léger blush relevant son teint harmonieux, un peu de fard à paupière et du mascara. Quand elle sortit de chez elle, ses cheveux étaient déjà secs, formant de jolies cascades le long de ses épaules.
Jules décida de se rendre au parc à pieds, histoire de se dégourdir les jambes. Il faisait beau, un temps ensoleillé, de quoi l’égayer un peu en cette journée aux allures maussades. En arrivant là bas, ce fut avec automatisme qu'elle s'assit à côté du lac, sur le pied d'un arbre, les jambes croisés et un livre devant les yeux, les écouteurs aux oreilles. C'était là qu'elle était le mieux, elle en était sûre.

Korin ouvrit les yeux tôt ce matin. La nuit n'avait pas encore prit fin, la lune brillait encore dans le ciel. Il s'était dégagé des couvertures, son torse nu était découvert et il portait en guise de pyjama un simple pantalon en soie noire. Il tourna la tête, encore endormi. Agathe était tournée contre lui. Ses cheveux bruns étaient relâchés et éparpillés sur l'édredon et son coeur se soulevait doucement dans sa poitrine. Elle semblait si paisible endormis ainsi, seulement vêtue d'un déshabillé bleu ciel. Korin resta quelques instants silencieux, regardant le plafond peint sobrement en blanc. Il souleva avec douceur le bras d'Agathe qui s'était enroulé contre son torse et se redressa dans les draps en flanelle. Il avait mal a la tête, il avait dut s'endormir en réfléchissant. Il haïssait sa tendance actuelle a se prendre la tête. Il aurait tant aimer être heureux avec Agathe, il en avait sincèrement envie. Il était clair qu'elle l'aimait et l'émeraude de la mère de Korin a son annuaire prouvait que celui ci avait également des sentiments forts pour la jeune femme. Bien sûr qu'elle comptait pour lui. Il passait du temps avec elle depuis sa naissance quasiment. Mais il était conscient de ne pas l'aimer comme il le fallait. Elle méritait mieux. C'était clair dans sa tête. Mais il ne pouvait pas la laisser. Il se contentait de l'aimer, de la satisfaire. Il s'agissait d'une relation forcée, mais il refusait de ruminer sur sa situation. Tout le monde était heureux ainsi et un jour, il en serait heureux aussi.... Il se le disait tant de fois de la journée. Un jour peut être parviendrait t'il a le croire. Il l'espérait de tout coeur. Il avait besoin de croire en son futur bonheur avec Agathe, c'était essentiel. Il sortit du lit en prenant soin de ne pas perturber le sommeil de son épouse. Il aurait dut déposer un baiser sur ses lèvres ou caresser avec tendresse sa chevelure, mais il n'avait pas le coeur a cela et il se sentait mal de ne pas le vouloir. Il attrapa un jean et un pull blanc en coton au coton en v, puis sortit de la pièce avec un léger pincement au coeur, comme toujours ces temps ci. Il avala un verre de lait, un bout de pain et du raisin puis alla se prendre une douche et se changer dans la salle de bain. Il avait mal dormi. Cependant il avait récupéré. Ses cheveux bruns étaient ébouriffés et ses grands yeux bleus endormis. Une douche froide lui fit du bien. Il se rasa ensuite, s'aspergea le visage d'eau, le cou de parfum puis s'habilla. Une fois prêt, il rédigea une rapide note laissée sur le comptoir de la cuisine puis sortit, verrouillant la porte derrière lui. Il avait besoin de s'éclaircir les idées. Instinctivement, ses pas le menèrent au parc. Il aurait dut bosser ses cours, ou tout bonnement restait ou était sa place : dans son lit avec Agathe, sa femme. L'embrassait dans le cou jusqu'à ce qu'elle se réveille. Mais il n'avait pas envie de faire tout cela bien qu'il soit conscient que cette perspective aurait dut le ravir au lieu de lui nouer l'estomac. Le parc. Il marchait seul, perdu dans ses pensées, regrettant l'insouciance de son enfance ou il n'imaginait pas une seule seconde devoir par la suite se marier contre son grès. Mais il ne devait pas voir ce lien, l'amour d'Agathe, comme une sorte de malédiction. Il se devait d'être un bon mari. Pour elle. Mais la route était semée d'embûches... Alors qu'il pensait que rien ne pouvait plus aggraver la situation, qu'il n'avait plus qu'a y gagner dans cette situation, il vit quelqu'un qu'il connaissait bien. Peut être trop. Quelqu'un a qui il ne devait pas parler. Car ce n'était pas bien. Cela ne faisait qu'empirer les choses. Sunday. La femme dont il était amoureux, mais pas celle qui portait la bague de sa mère. Celle qui le détestait aussi. Tant mieux. C'était peut être mieux comme cela. C'était plus facile. Cependant il ne put s'empêcher d'aller a sa rencontre. Il n'aurait pas dut. Il n'était plus libre. Il était l'homme d'une seule femme : Agathe. Mais c'était faux. Cela aurait dut être vrais, mais il avait tendance a considérer sa vie comme un mensonge, une lourde masquarade ou tout ses proches jouaient des rôles a son grand désespoir. Mais que pouvait t'il dire. Il se posta simplement devant elle, ne sachant que dire. Y avait t'il seulement une phrase a prononcer dans ce genre de situation ?

Comme disait Amartine, un seul être vous manque, et tout est dépeuplé. Ça faisait trois mois. Trois mois sans lui. Sans ses baisers, ses caresses et son envie irrésistible de l'emmener dans son lit. Au fond d'elle-même, Sunday le savait : elle avait eu raison de se disputer, ce jour-là, avec lui. Parce qu'éloignés l'un de l'autre, ils tentaient, de leur propre côté, de faire face à ce manque. Mais malgré tout, là, assise contre un arbre, dans un parc semblable à celui où elle avait rencontré Korin, elle songeait à ce qu'il aurait pu se passer, si ils ne s'étaient pas disputés. S'il n'avait pas fait sa crise de jalousie. Si elle ne s'était pas emportée comme à son habitude. A ce moment-même, ils seraient sûrement entrain de se retrouver, après une longue semaine séparés l'un de l'autre. Jules se rappelait encore quand elle allait le retrouver, après les cours de Monsieur, pour une petite heure de 'récréation'. Durement, leur séparation s'était installé. Direct, et incontrôlable. Leur fierté personnel les avaient empêchés de s'expliquer à nouveau. Ou peut être que Jules devait réellement se rendre à l'évidence : Maël avait tout arrêté parce qu'il aimait son épouse. Et que chercher des excuses pour y croire ne serait-ce qu'un peu ne servirait à rien.
Ce fut dans ces pensées que Sunday-Jules s'autorisa un petit somme, allongée, des lunettes de soleil sous les yeux. Doucement, la fatigue vint reprendre le dessus, et elle s'abandonna doucement aux bras de Morphée. C'est en se sentant observée qu'elle se redressa, déjà éveillée depuis quelques minutes. La surprise fut immense. Sous ses yeux se trouvaient Korin, en chair et en os. Qu'es-ce qu'il faisait ici ? Dans CE parc, à Oxford ? Ne vivait-il pas à San Francisco ? Après avoir retrouvé Tyler, Sunday avait réellement l'impression que le destin s'acharnait sur elle. La jolie blonde remonta ses Ray-Ban dans ses cheveux, les remontant un peu en arrière, dégageant par la même occasion son visage dénué d'expression. Elle baissa alors les yeux, silencieuse, tandis qu'il était là, devant elle, incapable de dire mot. « Qu'est-ce que tu... Vas t-en, s'il te plait... » C'était plutôt un supplice. Le voir ainsi la rendait si mal à l'aise. Il lui manquait tellement que le revoir là, sans qu'elle puisse lui sourire, ou goûter à ses lèvres, était si dure. La blessure était fraîche, et elle lui en voulait trop pour vouloir lui parler. Beaucoup trop.